Quentin GUICHARD est né en 1986. Il est diplômé de l'école nationale supérieure des métiers de l'image du son (fémis). Il vit et travaille à Paris.
Quentin GUICHARD est un artiste plasticien qui travaille essentiellement sur l'image et le medium photographique. Ses nombreuses expériences de voyage à travers les paysages de l’Islande participent à son processus créatif. Ses œuvres sont transgressives, dans le sens où elles vont « au-delà » de la photographie elle-même, pour franchir le seuil des apparences. A travers toutes les matières et les détails de ses œuvres, le souffle originel qu’il cherche tant à retrouver, se révèle de manière sensible et profonde.
En 2020, il reçoit la médaile d'argent du prestigieux prix de la photographie de Paris pour sa série "les lapidaires". En 2021 il est co-lauréat du prix Felix Fénéon.
English -> Quentin GUICHARD was born in 1986. He graduated from l'école Nationale Supérieure des Métiers de l'Image et du Son (FÉMIS). He lives and works in Paris.
Quentin GUICHARD is an artist-plastician essentially working on image and the photographic medium. His several travel experiences through landscapes of Iceland contributes to his creative process.
His work is transgressive and goes "beyond" photography itself, so to cross the treshold of appearances. The primal breath he seeks is revealed in a deep and sensible manner through every material and detail of his artwork.
His work was spotted during the prestigious Photography Prize of Paris, and he wins the 2020 Silver Medal on the Street lamps series.
Pour savoir si une oeuvre est disponible ou obtenir des renseignements, veuillez nous contacter par mail : gallery@bertrand-hassoun.com
English -> If you are interesting in a painting, you can contact us via this email : gallery@bertrand-hassoun.com
Exposition
09/09/2021 au 16/10/2021
"In Overscheyt"
Tirage encre pigmentaire sur papier Hahnemühle, exographie n°7, 24x30cm
Tirage encre pigmentaire sur papier Hahnemühle, exographie n°8, 24x30cm
Tirage encre pigmentaire sur papier Hahnemühle, exographie n°10, 24x30cm
Tirage encre pigmentaire sur papier Hahnemühle, exographie n°13, 24x30cm
Tirage encre pigmentaire sur papier Hahnemühle, in overscheyt n°2, 130x160cm
Tirage encre pigmentaire sur papier Hahnemühle, in overscheyt n°3, 200x160cm
Tirage encre pigmentaire sur papier Hahnemühle, in overscheyt n°5, 130x160cm
Tirage piezographique sur papier Hahnemühle, lapidaire n°1, 24x30cm
Tirage piezographique sur papier Hahnemühle, lapidaire n°3, 24x30cm
Tirage piezographique sur papier Hahnemühle, lapidaire n°6, 24x30cm
Tirage piezographique sur papier Hahnemühle, lapidaire n°9, 24x30cm
Tirage piezographique sur papier Hahnemühle, lapidaire n°12, 24x30cm
Tirage piezographique sur papier Hahnemühle, lapidaire n°13, 24x30cm
Tirage piezographique sur papier Hahnemühle, lapidaire n°17, 120x100cm
Lancer son âme dans l’abîme d’en haut
Dans l’une de ses Visions, la mystique flamande Hadewijch d’Anvers (XIIIème siècle) écrit qu’elle cherche « à lancer son âme dans l’abîme d’en haut ». En langue vernaculaire : In Overscheyt. Pour Quentin Guichard, cet oxymore a fait l’effet d’une révélation. Il entrevoit dans ce mot incandescent l’essence de sa propre quête : retrouver par le prisme de l’art, un royaume originel dont nous avons perdu la mémoire et dont nous recherchons les traces.
Pour cette seconde exposition à la galerie Bertrand-Hassoun, Quentin Guichard poursuit son récit des origines et se consacre à celle de la lumière. Il invente des espaces intérieurs, résonances d’univers et de planètes en formation, où rayonnent tous les éléments. Epure ou foisonnement des motifs, couleurs ardentes ou monochromes, dimensions massives ou intimistes : les trois séries de cette nouvelle exposition allient tous les contraires pour mieux révéler l’impulsion initiale qui les traverse. Chacune opère une transmutation de la matière, évoquant à partir d’un seul élément l’avènement de tous les autres.
La série In Overscheyt (2019 – 2021), qui donne son titre à l’exposition, est une méditation sur la nature de la lumière. Visions mystiques et explorations inspirées par l’astrophysique s’y retrouvent en territoire commun. Comment dépeindre la lumière originelle ? Quel sens donner à la matière qui l’a fait naître ? Plus encore que dans la série Les espaces illuminés exposée à la galerie en 2018, ces abîmes d’en haut semblent être des irradiations d’énergies pures, cristallisées entre les ténèbres et l’éblouissement. L’artiste cherche à rendre sensible le tumulte concentré dans le cœur de la matière. La lumière déploie ses ombres portées et ses incidences opaques, révélant le monde en même temps qu’elle le crée. Se devinent alors des cimes et des horizons incertains, où le regard cherche la stabilité.
Dans Les lapidaires (2020), Quentin Guichard explore les énergies autoritaires du basalte. Mémoire d’une ère tellurique, ces architectures abstraites évoquent toutes les forces de la nature : le cycle des vagues, les convolutions du vent, le flux incandescent de la lave cristallisée dans le temps. Le processus créatif de la nature y semble sans limite, tant ces structures cubistes oscillent entre le soulèvement et l’effondrement. Tel un graveur sur la plaque de cuivre ou le lapidaire taillant la pierre précieuse, Quentin Guichard fait émerger des fissures la lumière magmatique que les roches contenaient jadis et que le temps a obscurcie jusqu’à l’extinction.
Entre ces deux séries inédites que tout semble opposer, la série Souffles des roches (2017) retrouve ici un sens plus profond. Les exographies, œuvres hybrides mêlant la photographie à l’encre de chine, semblent figurer de l’intérieur la flamme éteinte des lapidaires en rallumant le brasier de la série In Overscheyt. Ces œuvres de petit format évoquent la nature ondulaire et corpusculaire de la lumière tout autant que les structures du monde minéral, en de fins rhizomes mêlant l’ambre à la terre brûlée.
L’art de Quentin Guichard est une expérience de la vision, au sens physiologique et spirituel du terme. Il est un art de métamorphoses et de mirages, né des plus intenses contrastes mais visant à l’harmonie. Il permet toutes les interprétations sans en imposer aucune, libéré de la figuration humaine mais conscient que dépeindre le tumulte des éléments est peut-être la voie la plus directe pour évoquer les mouvements de l’âme, prolongeant ainsi la visée de la peinture romantique. « Excédés du fatras de concepts, nous finissons par nous apercevoir que notre vie s’agite toujours dans les éléments dont ils constituaient le monde ; que c’est la terre, l’eau, le feu et l’air qui nous conditionnent, que cette physique rudimentaire révèle le cadre de nos épreuves et le principe de nos tourments ». Ces mots du philosophe Emil Cioran, extraits de La Tentation d’exister, expriment sans détour la trajectoire de Quentin Guichard.
S’il est intimement lié à l’art de la prise de vue, le rapport au réel de Quentin Guichard n’en est pas moins pictural. La photographie est l’art d’écrire avec la lumière. Arpentant l’Islande pour récolter des milliers de matières avec son appareil, l’artiste porte l’écriture photographique vers un point de tension où il ne s’agit plus d’écrire avec, mais d’écrire la lumière. Ses œuvres s’arrachent à la perspective photographique : les distances et les échelles se troublent. Fissures de roches ou gouttes d’eau, les détails photographiques apportent cette impression de véracité que la vision d’ensemble souffle d’un coup d’œil. De là, cette question persistante : que voit-on ?
Observant cascades et falaises basaltiques de l’Islande, il en lit les tumultes intérieurs et les envisage comme des phénomènes lui permettant de remonter le cours du temps. Il a ainsi passé d’innombrables heures à les observer, laissant son corps et son esprit être traversés par les énergies qu’il aspire à transcrire dans son travail. Des jours durant, il a recensé et photographié à toutes les échelles et sous tous les angles, ces mouvements de matières à partir desquels il compose chacune de ses images. Il les fusionne, les fracture et les superpose par centaines, renversant les rapports de profondeur induits par la perspective optique.
Quentin Guichard s’est immergé dans les grands textes, de la Genèse à l’Apocalypse, de Saint-Augustin à Ovide, en passant par la mythologie égyptienne qui nous dit que « le monde fut engendré dans un grand cri de Lumière ». Il a puisé dans les chef-d’œuvres des maîtres : Turner, Goya, Rembrandt, Le Tintoret, Léonard de Vinci. Non pour en reproduire les effets, mais pour apprendre d’eux l’art de faire irradier la lumière du fond de la toile sans en révéler la source. Cet arrière-monde qui reflue à la surface est un impénétrable mystère qui, dès que l’on pense le révéler ou l’entrevoir, s’échappe vers d’autres horizons et d’autres abîmes.
Quentin Guichard ne cesse de rappeler que le cheminement est plus important que l’accomplissement de la quête elle-même. Représenter l’image originelle est un désir aussi puissant qu’il est
voué à n’être jamais satisfait : en témoignent les œuvres de cette exposition.
Exposition
26/10/2018 au 09/12/2018
"Souffles élémentaires"
Les tirages sont tous limités (de 5 à 10 exemplaires). Tirage à base d'encres pigmentaires contrecollé sur aluminium et mis en valeur dans une caisse américaine. Certificat d'authencité et n° de série unique.
LES EAUX SOMBRES, eaux sombres 1 (2016), 60x80cm
LES EAUX SOMBRES, eaux sombres 2 (2016), 60x80cm
ElEMENTAIRES, esprit cruel (2015), 30x40cm
LES ESPACES ILLUMINES, l'ordre sauvage (2018), 80x100cm
ELEMENTAIRE,l'étreinte (2018), 60x70cm
LES ESPACES ILLUMINES, l'espace illuminé (2018), 80x100cm
LES PARADISIAQUES, la nuit (2016), 75x50cm
LES ESPACES ILLUMINES, le feu intérieur (2018), 80x100cm
LES ESPACES ILLUMINES, premier royaume (2018), 150x100cm
LES PARADISIAQUES, désert (2016), 75x50cm
EXOGRAPHIE, exographie 5 (2017), 24x30cm
LES PARADISIAQUES, la terre (2016), 75x50cm
EXOGRAPHIE, exographie 8 (2017) 24x30cm
EXOGRAPHIE, exographie 1 (2014), 150x150cm
LES ESPACES ILLUMINES, la plus haute clarté (2018), 80x100cm
Dans une goutte, toute la mer est contenue
"Texte écrit à l’occasion de l’exposition à la galerie d'art contemporain Bertrand Hassoun, Besançon"
J’explore dans mon travail la question de nos origines. Observant les plis de la nature avant d’en saisir le mouvement secret, ma démarche aspire à saisir le souffle universel, invisible et immanent, qui anime toute chose. Je cherche une forme de présence dissimulée dans le cœur de la matière. J’essaie ainsi de porter le langage photographique à sa limite, posant la question de notre rapport au réel où l’invisible se révèle dans les entrelacs et les mouvements de la matière elle-même. Tenir cette forme d’exigence du regard en utilisant la photographie relèverait presque du contresens. Après tout, autant peindre si je désire tant dépeindre l’invisible... Mais ce serait ignorer le pouvoir de véracité de la photographie, qui ne cesse jamais de dire, au détour même de ses propres mensonges : « cela a eu lieu ». En utilisant l’aura de la photographie pour lui faire révéler ce qu’elle ne peut substantiellement dévoiler, je suis en quête d’une trace ineffable et originelle, à l’œuvre derrière le voile de nos propres perceptions. Mais l’acte photographique n’est pas l’œuvre en soi : il est sa possible genèse. Par l’expérience du voyage et des forces de la nature, j’exerce ma sensibilité à sentir les énergies du monde comme un continuum permanent, où tout se lie et se délie. Car les éléments se prolongent et se répondent. Dans la roche qui se déverse d’une falaise, persiste le souvenir de la lave et de l’eau qui l’ont formée, puis érodée. Dans le déferlement d’une cascade, une intense force de gravité rencontre l’énergie ascensionnelle du vent, incitant l’eau qui s’effondre à retrouver le ciel. Quand j’explore l’Islande pour recueillir les matières qui deviendront les fragments d’œuvres à venir, je prends part à une expérience qui exige de tout mon corps d’être sensible à ce qui circule autour de lui. Je sonde ce que j’appelle l’épaisseur tellurique du réel, jusqu’à l’épuisement du regard. Jusqu’à cette étrange sensation de ne plus rien y voir, et d’être vu en retour. Vient alors l’instant où je dois photographier ce que la matière m’a dicté de sa propre réalité. J’en garde d’intenses souvenirs, comme autant d’épiphanies dans la compréhension de mon travail. Le vent d’Islande par exemple, celui qui vous gifle le visage et vous saisit les os, fait partie de l’expérience de l’œuvre à venir. Sans son épreuve, je n’aurais saisi comment créer la circulation des énergies dans Les paradisiaques. Le vertige éprouvé aux abords d’une cascade de cinquante mètres de hauteur est également une ouverture sur la nudité du réel qui vous transforme profondément. Elle vous rappelle à votre propre fragilité, à l’origine de votre peur et de votre volonté. Si je n’avais pas senti la peur, celle qui peut tétaniser, à me lever au bord du vide tandis que la roche vibre sous mes pieds et que le vent me déstabilise, je n’aurais pas eu l’idée des Espaces illuminés. Je pense même que le simple fait de se lever à cet instant dans cet espace extrême, vous fait comprendre ce que c’est, profondément, notre propre verticalité. Il s’opère une intense réduction de soi-même, qui répond à des stimuli archaïques confrontés à une force devenue l’univers tout entier. C’est une condensation totale de tous les éléments. Il faut ainsi tout penser et ressentir de façon hystérique : chaque détail devient un univers en soi, reflétant l’ensemble qui vous enveloppe. Ce que le poète mystique Kabîr exprime si profondément dans un poème sur lequel j’ai longtemps rêvé : « Qu’une goutte tombe dans la mer, tout le monde peut le comprendre. Mais que dans une goutte la mer soit contenue, qui peut saisir cela ? » Ces moments de pénétration du réel sont rares et souvent brefs... mais quand ils surviennent, vous savez qu’ils vous conduiront à méditer longuement l’expérience vécue. Il faut les explorer sans cesse, car ils deviendront le limon des œuvres à venir. Elles devront dépasser les limites que le réel impose, mais elles en seront tributaires. Elles seront de pures inventions faites de matières vues, touchées, senties, éprouvées. C’est là que se situe l’immense liberté qu’offre l’art de la prise de vue : l’expérience photographique est une forme de limite intraitable. Elle impose de rencontrer le réel et de se confronter à soi-même, dans un acte existentiel qui conditionne la façon dont les œuvres futures pourront advenir. C’est alors que je dépose l’appareil photographique et quitte la nature. Non pour m’en éloigner, mais pour en explorer la substance d’une autre façon, propice à l’émergence des œuvres. J’ai fini par considérer que mon travail, où je m’efforce tant à retrouver des espaces impossibles, se conçoit véritablement au sein d’un lieu métaphorique. Je l’appelle parfois mon atelier intérieur. L’espace de la prise de vue est un condensé de pure intensité où il faut apprendre à voir, pour espérer entrevoir toutes les potentialités du réel. L’atelier intérieur est en revanche un espace de silence, de stases et de reprises, de réflexions sur la justesse de ses choix et de ses orientations. Dans ce lieu intime, les œuvres ne peuvent plus se rêver. Il faut les inventer, à partir des centaines de matières photographiques qui constituent mon inventaire et ma nouvelle palette. Elles sont les unités premières de mon travail. Je les fracture et les fusionne en de multiples strates, dialogue avec leurs couleurs et leur invisible lumière. C’est le fruit d’une utilisation très spécifique et plasticienne du matériau photographique. Un processus de découverte et d’expérimentation incessant, à l’opposé des émotions et des intuitions vécues jusqu’à présent. Mais l’expérience du regard est la même — seule la perception du temps diffère. L’œuvre émerge ainsi par une longue maturation de la pensée et de la forme, où la mémoire des énergies ressenties s’active et se diffuse, en intégrant le temps comme un élément créateur à part entière. Des forces contraires puisent leur origine d’une source qui ne peut s’atteindre. Elle est un point aveugle et définitif. A chaque œuvre, son implacable constat : savoir voir est l’apprentissage le plus difficile. C’est un horizon inatteignable. Alors j’essaie d’y voir un peu mieux, à défaut d’en voir beaucoup plus, et d’en partager les traces et les souvenirs.
Galerie Bertrand-Hassoun
18 rue de la bibliothèque 25000 BESANCON
Tel 03-81-50-88-46
Email : gallery@bertrand-hassoun.com
Galerie d'art contemporain